22 juillet 2015
Le MOOC design culinaire organisé par l’école Ferrandi a pris fin il y a bientôt deux mois (déjà ?!). Cette initiation s’est avérée riche, enthousiasmante, fatigante aussi. Plus étonnant, une sorte de « communauté » de participants s’est créée spontanément. On a beaucoup échangé pendant et après le MOOC, notamment grâce au groupe Facebook initié par un participant (merci Benjamin !). Sans ces conversations quasi-quotidiennes et le partage de projets tous plus chouettes les uns que les autres, je ne suis pas du tout certaine que j’aurais tenu sur la durée.
J’ai eu envie de vous présenter quelques-uns des projets de mes talentueux camarades. J’aurais aimé vous montrer plus de choses, mais il fallait faire un choix (et cet article est déjà bien trop long), je m’en suis donc tenu à celui du jury qui a partagé ces coups de cœur dans une vidéo diffusée le 9 juin (si vous lisez tout l’article vous devriez reconnaître quelqu’un ;) ). J’avais envie de mieux les connaitre, je leur ai donc demandé de se présenter en quelques mots et de m’expliquer pourquoi ils ont suivi cette formation. Bien m’en a pris, ils sont passionnants !
« Je suis cuisinier de métier (Formation en Lycée hôtelier) et ai travaillé dans une variété d’établissements à travers le monde avant de reprendre mes études en « Business Administration » et de travailler maintenant plus en amont sur des projets de création ou de développement de concepts de restauration (Depuis le début du projet – Dossiers financiers, recherche de financements…- jusqu’à l’ouverture effective du point de vente). Je me suis inscrit à ce MOOC pour avoir une idée de ce qu’était la « fonction » de designer culinaire, pour avoir une espèce d’initiation. »
Son site internet : http://tbfc.fr/
A l’époque du « standardisé personnalisable », j’ai orienté mon travail sur un croque monsieur « à la carte », tout en réfléchissant sur une ergonomie permettant de le déguster sur le pouce, d’une seule main, debout dans la rue. J’ai souhaité travailler sur une variante qui n’a pas été travaillée dans sa nature par nos intervenants: le pain. En travaillant sur une recette rapide à mettre en œuvre, j’ai souhaité proposé une recette de base, qui peut se décliner selon les envies (pain au lard, à la tomate, au fromage, aux épices, aux herbes…). Pour l’exemple, j’ai réalisé un pain à l’estragon. Afin de proposer un produit innovant, pouvant se manger « sur le pouce », j’ai imaginé une coque de fromage gratiné, qui pourrait encore une fois se décliner selon les recettes, avec des graines, des épices, des herbes séchées…. Au centre de ce croque monsieur, une « raviole » de jambon, enfermant une béchamel, du comté râpé, et un jaune d’œuf cru. On peut imaginer des déclinaisons, avec par exemple du magret de canard fumé, entourant un morceau de foie gras poêlé… J’imagine ainsi un point de vente de type « restauration rapide » qui proposerait à ses clients de composer eux-mêmes leur croque monsieur, avec 5 pains, 5 garnitures, et 5 « coques », tous différents ! J’ai bien sûr pensé à la version « bistrot », avec une coque encerclant le croque monsieur…
Son croque-monsieur en version brasserie :
Et en version Snack :
Son projet en détails et les commentaires du jury (en vidéo).
« Je suis une touche à tout, c’est peut être mon problème aussi, j’aimerai savoir tout faire, tout essayer, tout voir. j’ai quitté à 15 ans mes parents et la campagne pour vivre la grande aventure à Paris à l’école Boulle pour devenir architecte événementiel ( je crée des stands d’exposition pour les salons). Mais depuis maintenant 5 ans je m’ennuie un peu dans mon métier et donc il y a deux ans, j’ai pris un congé pour faire un CAP pâtisserie car je voulais ouvrir un salon de thé avec des ateliers de loisirs créatifs et culinaires, car j’aime rencontrer les gens et transmettre, pour l’instant je fais des ateliers à mon domicile et cela m ‘apporte beaucoup lorsque je vois la satisfaction et la fierté des personnes repartant avec leur production DIY. Ma mini entreprise s’appelle Le comptoir des pipelettes … ça me ressemble. Dans ma famille la cuisine a toujours eu une grande importance… (quand j’ai faim je suis mal-aimable ;) ). J’ai transmis cet amour à mon fils qui est entré en BAC PRO à Ferrandi, c’est grâce à lui que je me suis inscrit. Le Mooc a été une dégustation familiale. Moi ce que j’aime dans la création que ce soit culinaire ou autres, c’est l’aspect « ébullition intellectuelle », et l’excitation de la surprise, et des tests, là aussi j’entre dans mon monde et il ne faut pas me déranger ( si si je vous jure je suis quelqu’un de sociable). Je donne aussi des cours d’arts Appliqués à des pâtissiers et des boulangers en plus de mon travail d’architecte. J’ai été très heureuse de gagner le prix du chocolat, car c’est celui où j’ai le plus explorer la plasticité et le coté création instantanée, où il y avait une part d’imprévu et de spontanéité. Et puis en plus j’ai toujours un doute sur mes capacités lorsque je vois toutes les idées des autres, je me demande toujours si j’aurais pu avoir cette idée merveilleuse. La création est un travail, L’illumination arrive rarement… » Sa page Facebook et sa boutique de bijoux.
Le chocolat avec ses notes puissantes et rustiques et son origine volcanique m’a évoqué la géologie. Mon projet est un travail sur le temps, l’enfouissement, la transformation des éléments sédiments en compression. Chaque âge est enfoui et métamorphosé par le suivant, l’histoire est inscrit avec les âges comme les cernes d’un arbre.
Le projet est ainsi traité par des dégradés: – dans l’épaisseur des couches, les couches inférieures sont plus épaisses et compressées, les couches supérieures sont plus fines et légères. Le croquant et la rapidité de fonte sont alors différents. – dans la finition du mat au brillant – dans le goût, en Indonésie les chocolats courants sont sucrés, dans un même esprit le chocolat des profondeurs est moins sucré, par rapport aux couches supérieures. – dans la représentation des matériaux, du bas vers le haut on passe d’un état de roche à un état minéral puis à un état animal/insecte puis à un état végétal et enfin aqueux. C’est aussi un travail sur le relief du chocolat pour qu’il ne soit pas lisse et offre des stimuli différents en bouche. Sa silhouette est brute et graphique, sous ça forme simple c’est néanmoins un un objet très complexe. Le projet dans sa forme reprend l’idée d’un échantillon de forage géologique, il serait présenté dans un tube transparent pour montrer le coté brut des palets qui le constitue, chaque palet est un mini tableau et raconte une histoire sur le temps passé… La personne qui le déguste voyage dans le temps et part pour les profondeurs de la terre. Le projet a pour nom « Lapisan » qui veut dire strate en indonésien.
Les commentaires du jury en vidéo.
« Delphine et Floriane sont âgées de 24 ans. Elles ont fait leurs études de graphisme ensemble et n’ont donc aucune formation dans la cuisine. Leur BTS en poche, elles ont ensuite pris des chemins différents : Delphine s’est dirigé vers le numérique, Floriane a pris le temps de voyager pour revenir à ses premiers amours ensuite, le graphisme et l’édition. Cependant, elles ont toujours été attirées par le domaine culinaire, que ça soit autour de dîner entre amies, découverte de nouvelles adresses, après midis tambouille… C’est ainsi qu’elles ont décidé il y a un an, d’ouvrir leur blog Söta Salt à deux, liées par cette passion commune. Söta, c’est pour le sucré, pour la douceur, pour les gâteaux et la gourmandise ! Floriane, c’est la part sucrée du blog : elle rêve d’ouvrir son salon de thé quand elle sera grande. Très inspirée par la culture suédoise, elle distille cette influence à travers les petits motifs géométriques du blog, associant les palettes colorées des photos à ses dessins. Salt, c’est pour le salé, le dynamisme, le pimenté, le fromage et l’exotisme ! Delphine, c’est la part salée du blog : issue d’une double culture, elle connaît par coeur les fromages à leur odeur, elle met des épices partout (c’est sa maman qui lui a appris), elle manie aussi bien la fourchette que les baguettes ! Toutes les deux ont décidé de mélanger leurs caractères pour former un sacré mélange de saveurs : à travers Söta Salt, elles cuisinent, elles testent, elles observent et elles voyagent… au cours de la première année de ce blog, elles ont pu constater avec plaisir l’alchimie qui se crée lorsqu’elles cuisinent à deux. A présent, c’est comme si il faisait partie d’elles depuis toujours ! Le MOOC leur a permis d’appliquer cette passion à travers un domaine pas si éloigné de leurs envies : le design culinaire. Les rendus étant photographiques, cela leur a permis d’étendre leurs compétences à des rendus imposés, avec des contraintes et une réelle demande de départ. Des consignes qu’elles avaient déja expérimenté dans leur domaine d’étude mais pas dans le secteur de la cuisine. Avoir un avis professionnel et communautaire, de la part des autres participants, était très enrichissant. Que ce soit en terme d’apprentissage, mais aussi de reconnaissance pour la Cueillette. C’est un premier pas contribuant à confirmer un peu plus leur désir d’évoluer dans cette voie professionnelle. » Leur blog et leur page Facebook.
Véritable petite « bulle de fraîcheur », La Cueillette propose une nouvelle façon de déguster le chocolat : elle offre ainsi la particularité de présenter une petite palette de chocolats noirs aux différentes variations de sensations fruitées. A l’apparence sphérique, la bulle, dénuée de son emballage, est en vérité séparée en plusieurs segments évoquant les quartiers d’un fruit. Ces fragments sont au nombre de 12, pour les quatre sorte de chocolats que nous avons dégusté. Il y a donc 3 quartiers par sorte de chocolat. Un jeu de textures délicat, moulé sur les tranches des quartiers, vient différencier chacune des sortes de chocolat proposée. Chaque texture a été pensée selon les ressentis fruités des chocolats : pour le cacao venant du Pérou, aux notes d’agrumes, la tranche est plutôt parsemée de petits trous faisant penser à la peau d’une orange. Pour le chocolat dont le cacao vient de Sao Tomé, la texture est striée de fines rainures renvoyant aux notes boisées de fruits des bois. Pour le chocolat dont le cacao vient de Madagascar, qui nous avait marqué par son amertume, le moule retranscrit un aspect plus rugueux, très sec. Pour le chocolat venant d’Amazonie, la tranche du quartier à un toucher totalement lisse, en rappel à cette douceur et cette rondeur que nous avons apprécié lors de la dégustation.
Le moule a été réalisé par le talentueux Matthieu Cottier.
« Que dire de moi ? J’aime que les formes ou les apparences soient facilement décryptables, pratiques, utiles, belles, surprenantes… La nourriture c’est pareil : née anosmique, j’apprécie d’autant plus de cuisiner (et de manger :) lorsque cela à du sens pour moi, esthétique, social… tout est bon à prendre ! C’est aussi un lien avec mes souvenirs d’enfance, la fierté du « c’est moi qui l’ai fait », le plaisir indescriptible du jeu de mélanger des poudres, liquides, couleurs et transformer cela en quelque chose de si beau, qu’il donne envie d’être mangé…ou pas ! Alors, lorsqu’une amie m’a parlé de ce MOOC, j’ai été immédiatement convaincue que cela allait parfaitement me convenir, alimenter ma quête. L’apport théorique des enseignants, les échanges et productions des autres participants ont ouvert le champ des possibles et ont largement contribué au succès de cette aventure. »
L’expérience du réseau, voulue ici comme territoire vivant matérialisé par un fil, évoqué ou réel, que l’on construit autour de nous à travers des décisions que l’on prend : alimentaires, vestimentaires, éthique, géographiques… Jusqu’à nouer le réseau qui nous convienne. Nous allons broder le fil de nos relations dans un atelier de confection comestible… Au cours de ce “happening alimentaire”, le réseau va se matérialiser… Nourriture textile ! Ici fusionnent dans un univers onirique deux préoccupations essentielles de l’homme. Ici, se tisse un repas au fil des affinités gustatives et des appréciations relationnelles. Dans ce buffet ouvragé et ludique, on remue pour tester, goûter, parler jouer… dans ce repas cousu pour ne pas tenir en place, la voix des anciens nous chuchote “file de table !”.
Son projet en détails et les commentaires du jury en vidéo.
« Je suis une parisienne de 23 ans, Je ne travaille ni dans le design ni dans la cuisine, je suis animatrice pour enfants. Auparavant j’ai fait des études en Arts du Spectacle puis je suis partie vivre une année en Australie, ce qui explique ma passion pour la culture aborigène et australienne. Je me suis inscrite sur ce MOOC avec ma mère (qui, elle, travaille dans la cuisine) pour m’amuser et en apprendre plus sur le Design Culinaire, j’avais tenté de passer l’ESAD de Reims il y a 3 ans (gros échec, ha ha !) mais je suis toujours resté une passionnée de cette discipline ! Ce MOOC m’a beaucoup apporté, en plus de son apprentissage et de la distraction donnée, j’ai appris à être plus organisé et à avoir confiance en ce que je peux créer. Etre reconnue par les autres participants ainsi que par le jury m’a vraiment « boostée » et touchée. »
Pour les aborigènes la Terre est couverte d’un système de signes, telles les empreintes que pistent les chasseurs qui se déplacent non pas dans un paysage mais dans un domaines saturé de significations. La spiritualité aborigène se base sur le réseau : un réseau de croyances et de mythologie. Avant la conquête de l’Australie par les anglais, plus de deux cent tribus vivaient sur le continent. Les dernières existaient empreintes de cette philosophie du réseau : une tribu à l’est du pays pouvait être « connectée » avec un groupe de l’ouest par un ancêtre, une histoire, une mythologie et même un aliment commun. Certains aborigènes péchaient le barramundi quand leurs voisins condamnaient cette chasse. C’est par cette conception du réseau que m’est venue l’idée du repas « Bamal Nggununy » (En aborigène Bamal : Terre, Nggununy : nourriture).
Son projet en détails et les commentaires du jury en vidéo.
A.k.a. votre gourmande (et rougissante) Bluette. J’ai torturé les copains avec mes questions, à mon tour…
J’ai toujours été très (très) gourmande. Il y a quelques années j’ai du suivre, pour des raisons médicales, un régime particulièrement drastique et long. À peu près tous les plats que j’aime m’étaient interdits. Je regardais les autres manger en essayant de me rappeler le goût de tel ou tel aliment. J’observais leur gestuelle, comment ils coupaient, attrapaient la nourriture (pardon d’ailleurs à tous ceux que j’ai fixé intensément pendant leur pause déjeuner :) ). Je crois que c’est de ces années de privation que vient mon intérêt pour les modes de consommation et le design culinaire. Depuis 2 ans je peux à nouveau manger presque normalement. À peu près au même moment j’ai déménagé pour un appartement qui a une vraie cuisine (la vie est bien faite). Depuis j’expérimente (et je mange…) beaucoup, d’autant que mon activité de graphiste freelance me laisse pas mal de temps libre.
Participer à ce MOOC, être encadrée en répondant à des briefs précis, avec des deadlines (parfois un brin trop rapprochées ) m’a vraiment confortée dans mes envies de design culinaire. C’était aussi une chouette expérience humaine (bien que dématérialisée). Je recommencerais demain si c’était possible ! J’aimerais vraiment poursuivre ce cheminement. Je ne sais pas encore comment, mais il est certain que vous continuerez à voir passer ici de drôles d’expérimentations comestibles (et que ma petite cuisine continuera à ressembler à un chantier…).
– Projet croque-monsieur « les Croque-Cubes »
– Projet chocolat « Chocolate Pillows »
– Projet réseau « les Éclaireurs » :
Nous vivons dans un monde connu, cartographié. Qu’arriverait-il si, brutalement, notre environnement nous devenait étranger ? Comment survivrions-nous ? Comment mangerions-nous ? Ce repas interroge notre façon de nous approprier la nature, de partager le savoir et les denrées. Dans un paysage inconnu et encore vierge les éclaireurs vont découvrir différents écosystèmes culinaires. Ils bâtiront au fil de la soirée un réseau immatériel de connaissances et de partage figuré par une carte sur laquelle ils noteront leurs trouvailles et les routes empruntées.
Le projet complet et les commentaires du jury en vidéo.
J’espère que vous avez apprécié autant que moi cette gourmande ballade. Merci encore à Ferrandi et à nos professeurs, Marc Brétillot, Eric Trochon et Rémy Lucas pour cette chouette aventure ! Pour finir, je voudrais faire un clin d’œil spécial à la benjamine du MOOC qui à 13 ans nous a tous impressionnés par sa volonté. Bravo Maëva ! Allez donc faire un tour sur son blog gourmand. À bientôt pour de nouvelles aventures !
Étiquettes : chocolat, croque-monsieur, design culinaire, design événementiel, food design, mooc ferrandi
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Ca a été un plaisir de suivre tes projets, et de suivre ce MOOC ! Quelle belle communauté nous formons. Même si ça a parfois été éprouvant je renouvellerai l’expérience avec plaisir :)
C’est vrai que ça a été assez éprouvant ;)
Ça serait chouette qu’on continue à expérimenter ensemble !
J’étais inscrite, j’avais commencé à bosser sur le croque et j’ai lâché rapidement prise (les délais, sans compter les bugs, ont eu raison de moi). Je n’ai du coup rien rendu mais j’ai conservé les cours précieusement car rien que cela m’a déjà beaucoup fait réfléchir. Y a-t il moyen de consulter, voir rejoindre le groupe FB du MOOC ? J’aimerai voir un peu ce que les autres ont proposé et faire connaissance d’autres participants captivants. Quoi qu’il en soit, félicitation pour ton prix. J’ai trouvé ton travail et celui de Fabienne vraiment intéressants.
Oui les délais étaient… compliqués. On a tous finis sur les genoux :) Le groupe FB est privé mais envoie une demande, Maeva t’acceptera sans problème : https://www.facebook.com/groups/1559154254361740/. Il faudra que tu remontes dans les archives parce que depuis la fin du MOOC c’est beaucoup moins actif, forcément.
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